DICTIONNAIRE DES LIVRES ET JOURNAUX INTERDITS

FAQ


(frequently asked questions)

• Le dictionnaire est-il exhaustif ?

Oui. Il a été établi à partir d'une consultation méticuleuse du Journal officiel, suivie de vérifications et de recoupements qui font exclure tout oubli. Il est même plus fiable et plus complet que le Journal officiel car celui-ci n'est pas exempt d'erreurs allant de la simple coquille à l'inversion de noms ou au mauvais titrage d'arrêtés. Plus de 300 erreurs commises par le Journal officiel ont été relevées et indiquées.

Notez toutefois que ce dictionnaire prend pour point de départ le vote de la loi du 16 juillet 1949, répertoriant les interdictions décidées par le ministère de l'Intérieur de cette date à aujourd'hui. Notre censure contemporaine en quelque sorte. Mais vous n'y trouverez pas les décisions plus anciennes.

Parce que trop hors-sujet, n'a pas été traitée dans les annexes une décision gouvernementale de 1961 visant les "feuilles" et "lettres de renseignement" qui, durant la guerre d'Algérie, a permis l'interdiction d'une vingtaine de bulletins politiques confidentiels.

• Je ne trouve pas dans le dictionnaire un livre ou une revue dont j'ai entendu dire, par ailleurs, qu'ils avaient été interdits.

Vous pouvez en conclure que cette publication n'a pas été frappée d'un arrêté d'interdiction. Elle a probablement connu d'autres déboires : menaces, saisies, interdictions locales, procès, autocensure... Voici des exemples :

Jeanne la pudeur de Nicolas Genka : Rééditant ce roman en 1999, les éditions Flammarion affublèrent sa couverture du bandeau "38e année d'interdiction". En réalité, seul le précédent roman de Genka, l'Épi monstre, avait été interdit. Explication : Genka parle comme il écrit, dans un style très allusif. Procès intenté par sa famille et interdiction administrative se confondent lorsqu'il témoigne de ce que la censure lui a fait subir.

Fantax : Dès les années 1950, le bruit courait que cette revue de bande dessinée avait été interdite. En réalité, elle fut sabordée par son éditeur (et dessinateur) Pierre Mouchot, à l'arrivée de la loi de 1949 (et relancée, de façon éphémère, dix ans plus tard). Une autocensure qui ne porta pas chance à Mouchot : pour d'autres illustrés, il fut le seul et unique éditeur pour la jeunesse poursuivi (et condamné) de toute l'histoire de la loi de 1949 (voir Images interdites à ce sujet).

Fantask : Un titre ressemblant à Fantax, édité dans la même ville de Lyon, ayant donné naissance à une légende similaire. On crut longtemps que cette revue de bande dessinée, traduisant pour la première fois en France les Fantastic Four, Spider-Man et le Silver Surfer, avait été interdite, en 1969, car telle était l'explication fournie aux lecteurs par son éditeur. Il fallut attendre Images interdites, vingt ans plus tard, pour que la vérité soit rétablie : les éditions Lug avaient sabordé leur revue à succès devant de simples menaces de poursuites judiciaires émanant de la Commission de surveillance. Une autocensure inutile : il est probable que, par crainte du ridicule, le parquet ne se serait jamais engagé contre le gentil Spider-Man. L'aurait-il fait, on s'en gausserait encore !

Boule et Bill t. 2 de Roba : Le cas de cet album de bande dessinée pour la jeunesse des éditions Dupuis, sises en Belgique, est complexe. En 1964 et 1965, il fut publié en deux versions : la couverture était la même, mais le contenu totalement différent. Jusqu'à ce jour (et même, malheureusement, dans Images interdites), on expliquait cette bizarrerie par une interdiction d'importation ayant empêché l'entrée en France de la première version. C'était ainsi que Roba et d'anciens responsables de Dupuis résumaient les choses. Or la consultation des documents administratifs montre qu'il n'y eut pas d'opposition officielle. L'action de la Commission de surveillance se limita à réprimander l'importateur pour le tome 1. À confirmer par des recherches dans les archives Dupuis, on peut avancer l'hypothèse suivante : ce sont ces réprimandes qui, par un phénomène d'autocensure, bloquèrent l'importation du tome 2.

La Question d'Henri Alleg : Paru en 1958 aux Éditions de Minuit, cette dénonciation de la torture pratiquée par les forces françaises en Algérie a été saisie selon une procédure qui aurait théoriquement dû déboucher sur des poursuites judiciaires (qui ne vinrent pas). Il en fut de même pour une vingtaine d'autres livres politiques, à la même époque. Une censure des pouvoirs publics qui n'entre pas dans le cadre de ce dictionnaire.

Septentrion de Louis Calaferte : Autant il est facile de prouver qu'un livre a été interdit, puisqu'il suffit de produire le document qui en atteste, autant démontrer l'absence d'une interdiction est ardu et nécessite de réunir un faisceau de preuves. Le dictionnaire aurait pu se contenter de passer sous silence ce roman, publié par Claude Tchou en 1963. Mais la légende de son interdiction était trop répandue pour qu'il ne soit pas nécessaire d'expliquer pourquoi Calaferte s'estimait victime de la loi de 1949, alors même qu'il n'y avait rien eu contre lui, pas même une menace. Consultez l'index pour prendre connaissance des résultats d'une longue enquête.

Bagatelles pour un massacre de Louis-Ferdinand Céline : Si les pamphlets antisémites de Céline ne sont toujours pas réédités aujourd'hui, alors que les doter d'un avertissement ou d'un appareil critique le permettrait, ce n'est pas parce qu'ils sont interdits, mais parce que la veuve de l'auteur s'y oppose.

J'irai cracher sur vos tombes de Vernon Sullivan : Paru en 1946, ce roman de Boris Vian fut longuement poursuivi en justice. Côté censure administrative, il n'a pas été frappé postérieurement au 16 juillet 1949. Et avant cela ? Il y eut quelque chose, c'est sûr, mais à une date indéterminée (les avis divergent) qui ne laissa pas de trace au Journal officiel. (Voir Anthologie érotique de la censure ou Histoires de censure à ce sujet.)

Gai Pied hebdo : Plusieurs fois cité dans le dictionnaire, le plus célèbre journal d'information homosexuel français n'y a pas d'entrée puisqu'il fut toujours en vente libre. En 1987, Charles Pasqua souhaitait l'interdire et avait entamé la procédure de concertation qui précède obligatoirement (depuis 1983) ce genre de décisions administratives. Les responsables du journal avaient immédiatement alerté leurs confrères du sort qu'on voulait leur faire subir et, devant le tollé médiatique, le ministre s'était gardé de concrétiser ses projets. La presse de l'époque avait très largement et très clairement rendu compte de l'affaire et même un lycéen aurait pu, sans connaissance particulière du droit, en faire un résumé correct. Mais, depuis une dizaine d'années, l'avocat Emmanuel Pierrat dissémine la légende d'un Gai pied hebdo qui aurait été interdit puis désinterdit. On trouvera cette réécriture de l'histoire sous sa plume, dans, par exemple, le Dictionnaire des cultures gays et lesbiennes des éditions Larousse.

Prince et Léonardours de Mathieu Lindon : L'interdiction de ce roman aux éditions P.O.L., en 1987, est également une légende que fait courir l'avocat Pierrat en un interminable copié-collé (dans le même Larousse en 2003, le Droit de l'édition appliqué en 2000, le Sexe et la loi en 2002, le colloque Visages de la censure en 2006...). Son sort, sans ambiguité, fut en réalité identique à celui de Gai Pied hebdo.

• Où acheter le dictionnaire ?

Vous ne trouverez que rarement le livre déjà présent en librairie, car il s'agit d'un petit tirage. Mais votre libraire pourra facilement vous le commander. Il est distribué par l'éditeur lui-même, c'est-à-dire le Cercle de la Librairie/Électre. (Tous les libraires connaissent Électre, qui leur sert de base de données.) L'ISBN est : 978-2-7654-1005-8. Si vous êtes Parisien, allez donc faire un tour à l'extraordinaire librairie Un regard moderne, 10 rue Gît-le-cœur, près de la place Saint-Michel, qui s'efforce de toujours avoir le livre à disposition, malgré les incessants achats. Enfin, en VPC, vous le trouverez sur tous les grands sites internet (Fnac, Chapitre.com, etc.).

Si vous êtes bibliothécaire, vous avez sûrement l'habitude de passer commande d'ouvrages de référence concernant votre profession au Cercle de la Librairie. (Ah ! le Guide de la classification décimale de Dewey, comme il est utile !) Procédez de même pour le dictionnaire : www.editionsducercledelalibrairie.com.